Perché sur un éperon rocheux au dessus d’une vallée profonde, sur la commune de Boule-d’Amont, le Prieuré de Serrabone (serra bona, la bonne montagne en catalan), fondé à la fin du 11ème siècle, est un haut-lieu de l’art roman.
Sainte-Marie de Serrabona, fut à la fois une église paroissiale et le prieuré d’une communauté de chanoines augustins. Au sortir du Moyen Âge, le lent déclin des villages alentour entraîne sa déchéance. L’église, d’abord fortifiée, est finalement abandonnée et sert d’étable. Restauré depuis les années 1960, Serrabone devient la propriété du Département des Pyrénées-Orientales.
Architecture de Serrabone
L’église date du 11ème siècle (1ère mention en 1069). Elle a été construite en deux temps. La nef étroite voûtée en berceau correspond à la première construction. On y ajouta un collatéral, un transept, un chevet semi-circulaire, 3 absides et une galerie de cloître au 12ème siècle. Toute la partie Est, effondrée au début du 19ème siècle, a été reconstruite dans les années 50.
La nef est voûtée en berceau brisé et le collatéral en demi-berceau. Les deux vaisseaux communiquent entre eux par deux arcades percées dans le mur les séparant (mur datant du 11ème siècle). Avec son appareil de moellons irréguliers de schiste et son plan assez grossier l’église est austère. Cependant, elle conserve en son sein le plus bel ensemble de sculpture romane du Roussillon. En effet, le Prieuré de Serrabone possède une tribune et un cloître orné de sculptures d’une qualité remarquable.
La tribune chefs-d’oeuvre de l’art roman
La tribune, ou jubé, est située à peu près au milieu du vaisseau central. C’est une forme architecturale rare constituée de trois arcades surmontées d’une corniche. Le jubé permettait de séparer le chœur où se réunissaient les chanoines de la partie de la nef où se trouvaient les fidèles. Elle a une forme à peu près rectangulaire avec une hauteur avoisinant les 3 mètres. Une balustrade domine l’ensemble. Son socle est constitué de colonnes supportant une voûte d’arête dissimulée par des croisées d’ogives purement décoratives.
Le vert-gris des murs épais de la nef construits en schiste local contraste avec la douceur du marbre rose provenant des carrières de Bouleternère. La façade de la tribune reprend dans son décor les symboles chrétiens tirés de l’Apocalypse. Les chapiteaux en ronde-bosse, forment un bestiaire étonnant peuplé d’aigles, de lions, de cerfs et d’êtres fantastiques : chimères, centaure, sagittaire. A l’exception d’un chapiteau mettant en scène Saint-Michel terrassant le dragon, les figures humaines sculptées sont symboliques. A noter un singe siffleur qui est le symbole traditionnel du « Malin ».
Le cloître de Serrabone
Le cloître est accolé au côté sud de l’église, et ses arcades ouvrent sur le ravin à proximité du prieuré. Ses arcades sont ornées de colonnes et de chapiteaux du même marbre rose. Ils sont semblables aux chefs d’œuvre de la tribune. Le bestiaire composé d’aigles, de lions, et de lions-griffons fait penser aux chapiteaux de l’abbaye de Saint-Michel de Cuxa. Les hommes représentés ne sont que de simples spectateurs. Les sculptures donnant sur l’extérieur sont plus archaïques et réalisés avec moins de soin.
Le portail Nord
Le portail Nord sur la façade du collatéral présente également un décor remarquable. Un placage de marbre, constitué de deux colonnes et d’un boudin recouvert de motifs. Le chapiteau de gauche représente un Christ trônant, bénissant de la main droite. Il est entouré d’anges enveloppés par leurs ailes. Sur le chapiteau de droite, deux lions se rejoignent dans l’angle pour former une tête commune.
Infos pratiques
Pour se rendre en ce lieu reculé, l’on passera par le beau défilé sauvage des Gorges du Boulès, aux parois impressionnantes de schiste, et l’on traversera le village médiéval plein de charme de Bouleternère.
Horaires : de novembre à mars 10h-17h, d’avril à mai et octobre 10h-18h, de juin à septembre de 9h30-18h30
Fermeture tous les lundis (d’octobre à mai) Plein tarif 4€.
Pour tout renseignement : 04 68 84 09 30